Le MUT a été proposé en septembre 2013 et il abordait alors des questions allant des droits des consommateurs, de la gestion du spectre et de l’itinérance à la neutralité du net. Au cours des négociations, le texte a été amputé de la réforme des frais d’itinérance et des règles de neutralité du net. Depuis mars, le MUT est entré dans la dernière phase de négociations appelée « trialogue », où les trois institutions de l’UE (le Parlement, la Commission et le Conseil européen) se mettent d’accord. Le Parlement aura le dernier mot lors d’un vote en séance plénière mardi prochain (le 27 octobre).

Le texte actuel du MUT pourrait améliorer la protection contre le blocage, les goulots d’étranglement et la priorisation du trafic en ligne dans l’UE. Pourtant, il existe encore des zones d’ombre qui doivent être clarifiées et renforcées, et nous espérons que ces changements seront apportés dans les prochains jours. Voici les deux points qui nous semblent d’une importance capitale :

Interdire la discrimination de différents types de trafic. Le texte actuel ouvre des voies aux FAI (fournisseurs d’accès à Internet) pour prioriser certains « types de trafic » sans violer la neutralité du net. Une telle discrimination leur permet de ralentir ou accélérer des types de trafic tout entier, ce qui serait un coup dur porté à la neutralité du net. Par exemple, une application de discussion en ligne pourrait inclure de la vidéo ou seulement du texte ; discriminer son trafic serait sans conséquence pour ce dernier, mais pourrait diminuer l’expérience utilisateur pour le premier. De plus, les caractéristiques techniques d’un « type » d’applications aujourd’hui pourraient être différentes plus tard, puisque les technologies évoluent et ajoutent de nouvelles fonctionnalités. Donc, un même traitement pour un « type de trafic » pourrait sembler raisonnable aujourd’hui mais pas demain. D’autres échappatoires sont possibles. Les opérateurs de réseau pourraient discriminer le trafic chiffré s’ils ne peuvent pas en déterminer le « type », ou pourraient créer des « types de trafic » uniques pour certaines catégories privilégiées, même sans distinctions intrinsèques – en séparant leur propre trafic privilégié ou celui de leurs partenaires de celui de leurs concurrents, afin de contourner les règles. Un amendement qui renforcerait un traitement équitable entre les différents types de données pourraient fermer ces échappatoires.

Préciser la définition de « services spécialisés » pour éviter la discrimination. Les services spécialisés – ou « services autres que les services d’accès à internet » – représentent un ensemble complexe et indéterminé de pratiques commerciales, dont très peu existent actuellement, mais qui pourraient se développer substantiellement à l’avenir. Comme il y a un certain potentiel pour tirer une réelle valeur de ces services, leur critère de définition doit donc être précisé pour interdire la discrimination qui porte atteinte aux services d’accès à internet ouverts.

Le Parlement européen aura l’opportunité de voter des amendements avant de valider le texte final, donc il est encore temps de leur faire connaître ces précieuses améliorations. Le résultat final de ce processus définira un standard solide pour un internet ouvert dans l’Union européenne et au-delà. Il est plus important que jamais de s’assurer que ces règles soient claires, compréhensibles et contraignantes. Agissez dès aujourd’hui : informez-vous sur les amendements et contactez des membres du Parlement européen sur : https://savetheinternet.eu/.


Raegan MacDonald, Senior Policy Manager, EU Principal
Jochai Ben-Avie, Senior Global Policy Manager
Chris Riley, Head of Public Policy