Contre-attaque contre les ordonnances secrètes

Mozilla se joint aujourd’hui à une coalition d’entreprises technologiques – dont Apple, Lithium et Twilio – pour déposer un mémoire d‘amicus curiae en soutien de Microsoft dans son affaire contre l’usage sans discernement d’ordonnances de non-publication. De tels commandements empêchent les entreprises de notifier à leurs utilisateurs les demandes du gouvernement concernant leurs données.

La transparence est le pilier central pour tout ce que nous faisons chez Mozilla. C’est fondamental pour la façon dont nous développons nos produits, avec un code source que n’importe qui peut inspecter, et c’est essentiel à notre vision d’un web ouvert, sécurisé, auquel on peut faire confiance et qui donne aux utilisateurs le contrôle de leur vie en ligne. Nos efforts de réforme dans les domaines de la divulgation des vulnérabilités et de la surveillance gouvernementale reposent sur l’idéal de transparence.

Et la transparence – ou plus exactement l’absence de celle-ci – est la raison pour laquelle nous nous soucions de cette affaire. Quand sont demandées des données personnelles, ces ordonnances de non-publication sont parfois rendues sans que le gouvernement ait démontré pourquoi cette imposition du silence est nécessaire. Pire encore, le gouvernement impose des règles à durée indéfinie qui empêchent les entreprises d’avertir leurs utilisateurs même des années après et longtemps après que chacun est d’accord pour dire que l’ordonnance de non-publication n’est plus nécessaire. Ces actes sacrifient inutilement la transparence sans aucune justification. C’est insensé et inacceptable.

Nous n’avons pas encore reçu d’ordonnance de non-publication qui nous empêcherait de notifier un utilisateur d’une requête pour ses données. Néanmoins, nous estimons qu’il est mauvais pour le gouvernement de repousser indéfiniment le délai pour qu’une entreprise puisse fournir  une notification à l’utilisateur. C’est ce que nous avions déclaré quand nous avons publié notre rapport de transparence en mai, nous avions dit que nous prendrions des mesures pour mettre en œuvre cette conviction. C’est exactement ce que nous avons fait aujourd’hui.

— Denelle Dixon-Thayer, directrice des affaires juridiques et commerciales de Mozilla

Le document original comme cette traduction sont sous licence CC By-SA 3.0


L’EFF à la cour : Le gouvernement doit informer les gens qu’il a accédé à leurs courriels et données personnelles

Ignorer le devoir de donner une notification d’une intrusion dans la vie privée des utilisateurs est inconstitutionnel

Seattle, État de Washington — L‘Electronic Frontier Foundation (EFF) a déclaré aujourd’hui à une cour fédérale que le gouvernement enfreint la constitution des États-Unis quand il omet de notifier aux gens qu’il a violé ou analysé leurs communications privées stockées par leur fournisseur Internet dans le cloud.

L’EFF soutient Microsoft dans son procès contestant des parties de l‘Electronic Communications Privacy Act (ECPA) qui autorisent le ministère de la Justice (DOJ) à délivrer une injonction à une entreprise pour avoir accès aux courriels et autres informations stockées sur ses serveurs distants, tout cela sans dire aux utilisateurs que leurs données ont été fouillées ou saisies. Dans un mémoire déposé dans l’affaire Microsoft v. Department of Justice pendante devant la cour fédérale du district de Seattle, l’EFF avec Access Now, New America’s Open Technology Institute et la juriste Jennifer Granick affirment que les protections du Quatrième Amendement[1] contre les perquisitions sans motif légitime et les saisies par le gouvernement s’appliquent à toutes nos informations, qu’importe leur format et où elles se situent.

« Si le gouvernement a un mandat pour fouiller dans nos courriers, nos coffres-forts ou nos courriels stockés dans le cloud, il doit avertir les gens de ces fouilles », déclare l’avocat employé par l’EFF, Lee Tien. « Quand des fouilles électroniques sont faites en secret, nous perdons notre droit à contester la légalité des ingérences des forces de l’ordre dans notre vie privée. Le Quatrième Amendement ne permet pas cela et il est temps pour le gouvernement de se conformer à la Constitution et de la respecter. »

Microsoft a poursuivi le DOJ au cours de l’année contestant les dispositions de l’ECPA édictées il y a 30 ans, bien longtemps avant l’émergence de l’informatique en nuage (cloud computing) omniprésent qui joue désormais un rôle vital dans le stockage de nos communications privées. Le gouvernement a utilisé la transition vers l’informatique en nuage comme une occasion pour conduire des investigations secrètes en se servant de mandats secrets de perquisition des fournisseurs de services Internet en cherchant à obtenir les courriels de leurs utilisateurs, selon les poursuites. Le gouvernement qui prétend au rejet de l’action ne veut pas que les titulaires de comptes soient informés qu’on a accédé à leurs données à cause d’une disposition inconstitutionnelle de l’ECPA, alors que des fournisseurs de services comme Microsoft sont interdits de prévenir leurs clients des fouilles.

« Quand les gens conservent leurs lettres personnelles dans le tiroir du bureau de leur domicile, ils savent si ces informations sont sur le point d’être fouillées parce que la police a frappé à leur porte et leur a montré un mandat », déclare l’avocat employé par l’EFF, Sophia Cope. « Le fait qu’aujourd’hui nos courriels privés sont conservés sur un serveur maintenu par une entreprise Internet ne modifie pas les obligations du gouvernement en vertu du Quatrième Amendement. La Constitution exige des forces de l’ordre qu’elles disent aux gens qu’ils font l’objet d’une fouille, ce qui leur permet de faire valoir leurs droits et donne une société libre avec un moyen crucial de demander des comptes au gouvernement. »

L’EFF remercie l’avocat de Seattle Venkat Balasubramani de FocalLaw P.C. pour son assistance comme conseiller local.

Le mémoire : https://www.eff.org/document/microsoft-v-justice-department-amicus-brief

À propos de l’affaire : https://www.eff.org/cases/microsoft-v-department-justice


Note du traducteur

Note 1 : « Le droit des citoyens d’être garantis dans leurs personne, domicile, papiers et effets, contre les perquisitions et saisies non motivées ne sera pas violé, et aucun mandat ne sera délivré, si ce n’est sur présomption sérieuse, corroborée par serment ou affirmation, ni sans qu’il décrive particulièrement le lieu à fouiller et les personnes ou les choses à saisir. » Quatrième amendement de la Constitution des États-Unis sur Wikipédia.



Traduction @Mozinet, relecture Théo et Hellosct1

Crédit illustration : Gagged Washington, photo prise par art around le 29 mars 2012 sous licence CC By-NC 2.0 — Flickr