Depuis l’affaire Snowden, de plus en plus de gouvernements se sont interrogés sur les limites convenables de la surveillance ; certains États cherchant à restreindre leur propre accès à l’information et d’autres à restreindre celui d’autres gouvernements. De manière générale, nous sommes heureux de soutenir ce genre d’efforts. Cependant, les récents évènements autour de la loi sur le renseignement débattue en ce moment en France nous préoccupent fortement. Le Gouvernement soumet ce projet au Parlement en urgence, avec presque aucune consultation des parties prenantes. De plus, les modalités exactes de ce projet de loi semblent changer fréquemment.
Les mesures de l’actuel projet de loi ayant été rendues publiques – y compris celles autorisant la collecte massive de métadonnées, l’analyse automatique par algorithme des communications des utilisateurs, ou encore les mesures visant à affaiblir le chiffrement – constituent une menace pour l’infrastructure d’Internet, la vie privée des utilisateurs, ainsi que pour la sécurité des données. Compte tenu de notre engagement pour l’ouverture et la transparence, nous ne nous inquiétons pas seulement du contenu de ces mesures, mais également de la manière dont cette législation est élaborée. Les discussions menées secrètement, à huis clos, aboutissent rarement à une législation forte.
Tandis que ces dispositions évoluent rapidement avec le processus politique, Mozilla rejoint de nombreuses institutions, entreprises et organisations de la société civile française pour exprimer sa profonde inquiétude quant aux mesures proposées par le Gouvernement français. En particulier, Mozilla s’opposerait à toute loi qui :
Permettrait la surveillance généralisée des communications, des activités sur le Web et des métadonnées des utilisateurs. Nous pensons que ceci représente une violation disproportionnée de la vie privée et fragilise la confiance nécessaire au fonctionnement d’un Internet ouvert.
Saperait l’efficacité des outils de chiffrement, voire la capacité à les utiliser. Le monde entier dépend du chiffrement pour garantir la sécurité et la confidentialité des communications et du commerce.
Négligerait le respect de la vie privée, une procédure équitable et transparente et les garde-fous d’une supervision judiciaire, ou permettrait la rétention injustifiée de données.
Nous sommes particulièrement préoccupés par l’installation de « boîtes noires » au sein des infrastructures des fournisseurs de services de communications afin de procéder à une surveillance par algorithme. Cette disposition oblige les entreprises à permettre une surveillance gouvernementale de l’activité en ligne de tous leurs utilisateurs, à la recherche d’un ensemble obscur de motifs comportementaux « suspects ».
Mozilla exhorte le Gouvernement français à ouvrir un véritable débat autour de cette loi. En particulier, il est nécessaire de prendre en compte son impact technologique sur l’infrastructure d’Internet et la sécurité des utilisateurs. À l’heure où il apparaît de plus en plus clairement que confidentialité et sécurité se renforcent mutuellement, le Gouvernement français semble vouloir mettre en opposition ces deux valeurs, au risque de les affaiblir toutes les deux.